mardi 23 décembre 2008

Epilogue

Notre pèlerinage est terminé. Nous pourrions nous dire : Lassés, pompés, vannés, éreintés, roués, crevés, moulus, fourbus, recrus, rendus, vidés par notre marche, mais heureux ! ou bien écrire : C’est fini ! et reprendre l’avion après avoir rendu visite à Carmen. Mais, je suis surpris par tant de trésors accumulés après une aussi longue marche, après tant de rencontres, après d’aussi bonnes et saines fatigues. Est-ce ainsi que Dieu se révèle sur le chemin ? En fait, je n’arrive toujours pas à démêler l’écheveau des raisons qui m’ont fait entreprendre ce pèlerinage en entraînant Marie-Thérèse avec moi. Certes, sans m’en rendre compte, j’ai été impressionné adolescent par des images de pèlerins sculptés sur les chapiteaux de Saint-Eutrope à Saintes ou sur ceux d’Aulnay de Saintonge. Plus tard, des récits de pèlerins m’ont passionné. J’avais fait des projets, vagues, trop vagues peut-être puisque je les oubliais périodiquement. A quelques mois de la retraite, comme un rappel à l’ordre, je découvre le guide de Louis Laborde-Balen à la librairie du monastère de Saint-Benoît-sur-Loire. C’est une librairie que je connais bien et jamais auparavant je n’avais vu ce guide dont l’édition remonte pourtant à quelques années. Il fallait m’exécuter. Je peux communément prétendre que j’avais besoin d’un temps de réflexion personnelle, d’un approfondissement justifié par l’âge ou par des évènements douloureux de notre vie : perte de Cécile, perte de nos parents. Tout cela est vrai et un peu court à la fois. Comme tant d’autres, je ne connais pas la vraie raison qui m’a fait entreprendre ce pèlerinage mais je suis convaincu que ma venue ici, en tant que pèlerin, ne doit rien au hasard. Il y a un mois de cela, ce poème écrit sur une clôture d’usine un peu avant Najera, que nous n’avions pas trouvé le temps de traduire, je le retrouve justement dans Laborde-Balen et je me permets de le recopier. Le curé d’Hormillejas qui a, paraît-il, écrit ceci, a manifestement tout compris.

Poussière, boue, soleil et pluie
C’est le Chemin de Saint-Jacques
Des millions de pèlerins
Et plus d’un millier d’années.

Pèlerins qui t’appelle ?
Quelle est cette force obscure qui t’attire ?
Ni le champ des étoiles
Ni les grandes cathédrales.

Ce n’est pas la bravoure navarraise,
Ni le vin de ceux de la Rioja,
Ni les fruits de mer des Galiciens,
Ni les champs castillans.

Pèlerins qui t’appelle ?
Quelle est cette force obscure qui t’attire ?
Ni les gens du chemin,
Ni les coutumes rurales.

Ce n’est pas l’histoire et sa culture,
Ni le coq de la Calzada,
Ni le palais de Gaudi,
Ni le château de Pontferrada.

Tout cela, je le vois au passage
Et ce m’est une joie de tout voir
Mais, la voix qui, moi, m’appelle
Je la ressens au plus profond.

La force qui, moi, me pousse,
La force qui, moi, m’attire,
Je ne sais même pas l’expliquer.
Seul Celui d’en-haut le sait.





Jacques Chauvelle
Saint-Pierre, le 1° août 2001

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